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07/06/2017
Resilience
WHEN ICARUS FALLS
 
Plutôt qu'une rupture, Resilience fait figure d'aboutissement pour ce groupe originaire de Lausanne. Après trois parutions discographiques s'inscrivant peu ou prou dans une veine Post Hardcore et Post Metal - Over The Frozen Seas en 2009 (trois titres pour ½ heure), Aegean en 2012, et Circles en 2014 (quatre titres pour moins d'1/2 heure) -, le quintette semble avoir trouvé un équilibre et une maturité dans sa recherche d'ambiances sombres et de puissance. Ombre et lumière, tourments et passions, en somme.

Les cinq compositions de Resilience maintiennent globalement tout à la fois ce goût pour les ambiances tourmentées et un rendu puissant. Encore faut-il s'entendre sur le mot puissance. Il ne faut plus attendre de la part de WHEN ICARUS FALLS d'éruptions colériques, de vocaux gutturaux et extrêmes, de riffs titanesques. La puissance se fait désormais nettement plus nuancée et subtile. Au niveau de l'architecture sonore, c'est la basse énorme et tendue de Claude HUMBERT DROZ qui sert de fondations à ses camarades. Il est appuyé dans ce rôle par la frappe sèche et féline de Xavier GIGANDET qui, même dans les parties en apparence dépouillées, introduit des subtilités rythmiques qui entretiennent l'animation.
Sur ce matelas rythmique épais et mobile, les guitares de Yann COTTIER et Luis CORDEIRO peuvent se permettre d'aligner autre chose que des riffs monumentaux ou des distorsions torturées ; sont privilégiées les notes mélodiques ciselées, délivrées avec netteté, voire délicatesse. On pense davantage à du Post Rock, à du Shoegaze, plus étonnant à du Rock psychédélique.
Relativement discrets dans le mixage mais toujours présents, les claviers n'ont de cesse d'apporter des nuances complémentaires, qu'elles soient douces ou plus inquiétantes.

Outre l'interprétation et l'architecture sonore, ce qui me semble notable dans ces cinq compositions, c'est qu'elles se basent sur des variations autour de rythmiques et de plans mélodiques, avec au final une logique de progression, comme si les logiques intrinsèques de certaines musiques orientales et africaines avaient été injectées dans un contexte occidental. A la clé, l'auditeur se trouve comme hypnotisé, taraudé par un sentiment de fascination, devant ces circonvolutions obsédantes. Les cinq de WHEN ICARUS FALLS seraient-ils devenus les derviches tourneurs du Post Rock ?

Hé oui, car il y a bien cinq membres au sein du groupe et l'un d'entre eux n'a pas été cité jusqu'à présent : le chanteur Diego MEDIANO. Certes, on retrouve ses vocaux caverneux et colériques sur Into The Storm et l'on entend une voix claire et angoissée sur A Blue Light. Mais, hormis ces interventions ô combien expressives et réussies, force est de constater que Resilience s'avère dominé par sa part instrumentale. Peut-être le prochain album fera-t-il une part plus importante à un chant qui aura trouvé de nouveaux modes de complémentarité avec des compositions moins foncièrement agressives...

Quoi qu'il en soit, Resilience m'apparaît comme une belle réussite, le genre d’œuvre dans laquelle il faut accepter de se laisser glisser, pour être porté par les remous et par les ondulations. Bien évidemment, les amateurs de ISIS, CULT OF LUNA, voire NEUROSIS, peuvent s'y intéresser ; on me permettra de rajouter que ceux qui n'en peuvent plus d'attendre un album de TOOL peuvent sans souci patienter avec celui-ci.

Vidéo de A Blue Light : cliquez ici
Alain
Date de publication : mercredi 7 juin 2017