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26/10/2019
Drei deita
VINSTA
 
S'agissant du projet d'un seul et unique homme, VINSTA devrait faire converger toutes les attentions vers le côté autogéré, et, a contrario, toutes les défiances pour les travers trop souvent inhérents à cette formule. Or, Christian HÖLL parvient peu ou prou à déjouer tous les pièges de cette attitude foncièrement autonome. Précisons que Drei Deita constitue d'ores et déjà le troisième album sous cet étendard, faisant suite à Vinsta (2014) et Vinsta Wiads (2017).

Ôtons d'entrée de jeu tout stéréotype quant aux productions solo en matière de Black Metal et assimilé : outre qu'il bénéficie d'un son performant (clair et nerveux), Drei Deita pourrait tout autant être l’œuvre d'un collectif que d'une âme esseulée. En l'occurrence, le chanteur et multi-instrumentiste Christian HOLL semble particulièrement à l'aise avec l'idée de proposer une musique sombre et romantique, dont il assumerait les rôles principaux. Il sera ici question avant tout, chose de mélancolie et de langueur maladive, les vocaux rauques ne valant que comme contrepoints des chœurs mélodiques. Dans un esprit tout à ait analogue, les riffs de guitare se font certes lancinants, au fil de tempos médiums, mais il apparaît très rapidement et très clairement que le but ultime est de toucher du doigt une certaine douleur maladive, arrachant le flambeau de la mélancolie des doigts desséchés depuis l'impulsion initiale remontant au XIXème siècle.
Une mélancolie par moments un peu mièvre, comme sur le titre éponyme et sur Oafocha Loda, qui manquent singulièrement de nerf. Les rythmiques hachées et les accélérations relatives de Raunocht ravivent quelque peu les débats

Les vétérans du Doom des années 90 ne s'y laisseront peut-être pas prendre, quoiqu'ils ne sauraient réfuter la justesse du propos. La génération suivante a de facto le droit de jouir de ce classicisme relevant d'une époque révolue mais activé par un savoir-faire parfaitement actuel. Le son s'avère tranchant, méthodique, offrant des riffs parfaitement découplés, tranchants et glacés. Entre vocaux rauques et d'autres (masculin et féminin) carrément doux d'une part, velléités rythmiques tranchantes et parties paisibles et atmosphériques d'autre part, cet album donne l'impression de flotter comme une brume automnale. Il n'est pas désagréable de se laisser gagner par cette mélancolie, animée par une force colérique (trop) sous-jacente. On pourrait juste souhaiter que l'interprétation se fasse davantage passionnée, moins sage, que ce soit dans le versant délicat ou dans son pendant plus rugueux.

Dans le cadre des compositions les plus longues, Christian HÖLL affiche un goût avéré pour les structures changeantes, à tendance progressive. Assurément, Drei Deita est avant tout le fruit de la vision ambitieuse et personnelle de son unique géniteur, visiblement habité par des sentiments poignants et complexes, retranscrits ici.

Vidéo de Oafocha Loda cliquez ici
Alain
Date de publication : samedi 26 octobre 2019