17 / 20
30/12/2020
Raya
POTHAMUS
 
Le trio belge POTHAMUS publie son premier album et, afin de mettre le plus de chances de son côté, il semble avoir pris soin de convoquer les meilleurs aspects de différents sous-genres. C'est ainsi que l'on peut déceler des emprunts au Post-Hardcore, au Post Métal, Post Rock, Post Punk, au Sludge, au Doom, au Dark Ambient... Une telle profusion d'inspirations peut en principe se révéler plutôt nuisible, créant une surcharge et des dosages problématiques. Bien au contraire, chez POTHAMUS, elle se traduit par une profusion propice à de très fortes intensités, à une densité par moments asphyxiante, mais aussi par des contrastes salutaires, sans lesquels l'ensemble ne serait qu'un énorme pavé.

Car il existe indéniablement une tendance monolithique chez POTHAMUS : gros riffs saturés, lignes de basse outrageusement métalliques et tendues, section rythmique intraitable, tempos lents, le tout se développant au gré de formats majoritairement imposants : Viso frôle les 10 minutes, Orath atteint les 10'30, Raya s'approchant des 17 minutes (tandis que les deux parties de Heravis cumulent 8 minutes). C'est justement parce que certains matériaux et dispositifs essentiels permettent d'ériger sur des durées longues des falaises sonores que le trio a pris soin d'installer des contrepoints plus tempérés, aux ambiances plus apaisées, aux manières plus subtiles. Subtiles mais néanmoins conformes aux pratiques globalement massives de ce trio qui semble vouloir compenser son faible effectif par une débauche d’intensité.

De fait, même les plages les plus apaisées – ou plutôt les moins ravageuses -, bien que ne renonçant jamais à une tension paranoïaque (principalement incarnée par une base froide et très tendue, digne héritière du Post Punk), même ces moments, plus apaisés en apparence, ne sont que des tremplins pour les immensités de plomb et de granit qui prédominent. D’ailleurs, pour les concrétiser, il suffit généralement d’un motif de guitare plus dépouillé, d’arrangements électroniques ou de motifs mélodiques synthétiques. Une sobriété ô combien expressive, justement parce qu’elle s’inscrit comme un contraste productif avec la puissance et l’aridité prédominantes.

Pas franchement essentiel dès qu’il est question de puissance de tir, le registre vocal alterne avec pertinence le registre clair et les prurits plus caverneux et extrêmes, les deux ayant en commun de se trouver mixés en retrait de l’imposant magma musical. Néanmoins, par leur expressivité relativement primaire, avant tout passionnée, ces expressions vocales contribuent de manière non négligeable à la passion à la fois raide et palpitante qui anime ce premier essai. Inutile de préciser que la suite discographique de POTHAMUS sera positivement suivie par nos soins.

Certes, le moindre pisse-froid pourrait reprocher à POTHAMUS de ne pas avoir été premier sur le créneau : immanquablement, le moindre triste manneken-pis non advenu opposera le nom des compatriotes d’AMENRA, actifs depuis la décennie passée… Ce qui ne réduit en rien ni l’efficacité fondamentale de POTHAMUS, ni la pertinence de ses compositions, pas plus que l’authenticité des interprétations tant vocales qu’instrumentales. Entre maîtrise, références et passion, POTHAMUS fait davantage qu’impressionner le quidam en mal de décibels torturés et puissants : il propose une perspective personnelle, encore au stade du développement.

Vidéo de Orath cliquez ici
Alain
Date de publication : mercredi 30 décembre 2020