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03/06/2021
Post-terra
KESEM
 
Après un EP sorti début 2020, le groupe californien KESEM revient avec son premier album long pour le moins inclassable. Post-Terra est un voyage de 40 minutes dans un univers qui synthétise un très large spectre d’influences.

À ce propos, Scott WERREN me confirme ce que j’avais ressenti : « Nous venons tous d'horizons musicaux différents. Jay vient de la scène électronique / noise et power. Ben vient de la scène metal / hardcore de la Côte Est tandis que Josh et moi venons de la scène Punk. Mais en vieillissant, nous nous sommes mis à écouter plus de trucs comme le prog, le krautrock et le free jazz. Sans compter qu’on balance un peu de FUGAZI ou de UNWOUND là où il faut. C'était l'un des objectifs avec KESEM : fusionner nos influences actuelles aux morceaux avec lesquels nous avons grandi. »

Les influences hétérogènes se combinent au service d’un ‘concept album’ que Josh AUSTIN me résume ainsi : « Des gens partageant le même dégoût de la folie politique volent une fusée et se barrent. Ils vivent alors cet isolement et cet enfermement dans le vaisseau spatial en quête d’un nouveau monde. Et enfin, ce sentiment de soulagement après avoir atterri sur une nouvelle planète. L’histoire s’inspire autant de l’actualité que des gens qu’on rencontre en allant à l'épicerie – ces gens divisés et en colère à cause d'un tyran potentiel qui, heureusement, n'est plus aux commandes. Ce sentiment s'est infiltré dans notre musique et nous avons mis le paquet pour utiliser cette émotion tout au long de l'album.

D’une façon générale, le son moderne est pétrit de vibrations des seventies. Le mixage que l’on doit à Paul ROSSLER (SCREAMERS / 45 GRAVE / DC3) est particulièrement riche et émaillé de nombreuses surprises, qu’il s’agisse de petits extraits de discours, de constructions d’ambiances par des bruitages ou de l’instrumentation hors normes qui fait appel à de la trompette, des samples et des synthés aux couleurs improbables.

Incroyable croisement entre du progressif, du metal et du punk, la première plage de l’album – No Future – m’a directement interpelé. Il s’agit d’une chanson dont la partition, les riffs, le placement de la voix pourraient être attribués à VOÏVOD. Y compris la bande son du final sous la forme d’un long bruit blanc au cours duquel reviennent par vagues successives des échos du morceau. Je suis directement conquis.
Le second opus – We Will Be Ready – démarre par une incroyable ligne de basse sur laquelle vient barrir une trompette avant de partir sur un riff punk qui se transformera bientôt en un space rock dans le style d’HAWKWIND. Finalement le morceau s’achève par des sons tellement graves qu’ils en deviennent rocailleux, comme des amas de galets roulant dans le lit d’un ruisseau.
C’est cette atmosphère qui sert d’ouverture à la troisième piste – Let Go – promenade dans l’Eden, magnifique instrumental mélodique de 7 minutes, archétype d’un splendide rock psychédélique qui vient introduire la quatrième plage : When The Stars Cave In. Ici, l’ambiance et la ligne vocale me rappellent le BLUE ÖYSTER CULT de la période Cultosaurus Erectus.

Notez que les quatre premiers titres enchaînés constituent une plage de 21 minutes sans blanc. Quelle magnifique face A pour une version vinyle ! Et les cinq morceaux suivants, eux-aussi enchaînés, s’avèrent tout aussi captivants et originaux :

Headfirst Into The Void dont le riff punky est doublé par une ligne de trompette et le court mais délicieux interlude musical Starbirth avec son clavier fluté me font penser à certains passages de RUSH, ainsi que certains aspects instrumentaux de Drifting Through Time.
Que dire de The Tyrant ? Le morceau commence comme du bon PINK FLOYD jusqu’à un somptueux passage de piano bluesy, puis vire à 90° et se poursuit par du pur BLACK SABBATH époque Ozzy.
Le final de The Light From Distant Moons est extraordinaire grâce à cette cavalcade insensée qui s’envole crescendo et la montée en puissance me plaque dans mon fauteuil comme si je subissais une pression de plusieurs G. Un final à couper le souffle.

Quel voyage magique ! Avec Post-Terra, KESEM honore son nom qui signifie justement magie en hébreux.

NB : Amis mélomanes et voyageurs spatio-temporels, si vous lisez cette chronique avant le 21 septembre 2021, veuillez régler votre time-machine sur cette date et foncer sur bandcamp pour vous procurer cet indispensable joyau de rock progressif dès sa sortie officielle. Pour ceux d’entre vous qui ne voyageraient pas dans le temps, il reste la possibilité de s’abonner à un de leurs comptes sociaux pour rester informés.

KESEM est :
- Josh AUSTIN, basse et chant ;
- Ben DANIEL, claviers, trompette et chant ;
- Jay HOWARD, guitare et sampler ;
- Scott WERREN, batterie.
Pumpkin-T
Date de publication : jeudi 3 juin 2021