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24/10/2021
Looking for transcendence
INDIGO RAVEN
 
Mon activisme musical remonte au début des années 80. J’étais alors animateur d’une émission radio de hard rock. Pendant des années, cette plage metal a été suivie dans la grille de programmation par une émission de New Wave / Cold Wave. Je raconte cela pour dire que l’album d’INDIGO RAVEN aurait fait une magnifique transition entre ces deux émissions. Caricaturalement, Looking For Transcendance aurait pu être à l’époque le point de jonction entre TROUBLE et THIS MORTAL COIL.

Attention, le précédent paragraphe ne sous-entend absolument pas que l’oeuvre sonne rétro ! Pour créer son univers très personnel, le groupe emprunte au doom metal des riffs hyper-plombés, au sludge un son de guitare très rude, et à la cold wave ses ambiances romantico-chamaniques portées par la magnifique voix de Julie DOCTEUR dont le style de chant n’est pas sans rappeler Elizabeth Fraser ou Lisa Gerrard. Enfin, pour habiller le tout, Benoït SANGOÏ se rend coupable d’une production très actuelle qui tire un excellent parti de tout l’espace sonore, y compris sur des passages instrumentalement minimalistes.

Looking For Transcendence se compose de 6 morceaux plus un bonus pour la version CD (une jolie reprise, moins acoustique mais tout aussi mélancolique, du petit chef d’œuvre de MAZZY STAR : Into Dust).

La première plage – Our Sacred Soil – est une prière de sorcier amérindien (ou de Tsahik Na’vi, au choix) portant l’amer constat de l’orgueil de l’Homme moderne vis-à-vis de la nature. Elle se compose de deux parties : une introduction sur un mantra de shaman prolongé par un énorme riff de doom metal. Majestueuse mise-en-oreille.

Introduite par quelques notes électro cristallines, Palin Genesis pose avec brio la voix aérienne de Julie sur une rythmique lourde et tribale. Littéralement existentialiste, le morceau joue ainsi avec de riches contrastes – ceux de la vie et de la mort ?

La troisième chanson Small hearted & Blind entretient un nouveau riff dans la pure veine de TROUBLE, y compris dans son développement rapide, avant de replonger dans l’incommensurable désespoir d’appartenir à la race des Hommes dont l’esprit est vide et l’âme aveugle.

J’ai été un peu déçu par le titre suivant The White Knight Syndrome car bien que je trouve le thème très bon, j’ai cette impression que le morceau se déroule trop comme prévu. C’est un bon morceau, agréable à écouter mais je perçois moins de relief, de surprises, que dans les trois précédentes compositions.

L’avant-dernier morceau (hors bonus), plus que lourd est carrément noir. L’atmosphère dépressive de Nightshade Winds est poussée très loin autant par les paroles que par la musique. En gros, on aime ou pas, mais ce morceau se situe exactement aux antipodes du ska festif. Personnellement, j’apprécie l’exploration de toute émotion ( y compris la dépression liée à un amour destructeur) quand elle est faite comme ici, avec talent.

Le titre de clôture – Where Lies Our Heart – quant à lui n’a rien de metal. Il s’agit d’une très belle pièce mélodique a cappella accompagnée en second plan de chœurs rythmiques qui renouent avec le rituel chamanique introduisant l’album comme pour boucler la boucle. En effet, après avoir balayé en cinq titres la noirceur de l’âme humaine, j’interprète ce dernier morceau comme une prière qui s’interroge sur nos tares ataviques afin de trouver une solution. C’est un espoir qui vient élucider le titre de l’album.

Looking For Transcendence se rapproche ainsi dans mon esprit d’un concept album en ce sens que chaque titre converge vers le dernier morceau. Au-delà de l’intelligence littéraire de l’œuvre, j’apprécie les très bons riffs et la production adéquate de Benoît. Cerise sur le gâteau, puisque je parlais de THIS MORTAL COIL en intro, je salue le travail conjoint d’Alexandre OLLIER pour la photo et de Julie pour l’artwork qui nous offre une couverture digne des plus beaux objets de 4AD.

Un excellent album qui allie avec une identité très forte, les sons lourds et épais du doom, le romantisme gothique et une vraie dimension spirituelle.

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INDIGO RAVEN est composé de :
- Julie DOCTEUR : chant, paroles, artwork ;
- Benoît SANGOÏ : musique, production ;
- Jean GREEN : basse (également dansMOURIR).

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L’album complet en streaming :
- Looking For Transcendence : Cliquez ici !
Pumpkin-T
Date de publication : dimanche 24 octobre 2021