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26/11/2022
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SWORD
 
En 1986, le premier album des Canadiens de SWORD, Metalized, avait démontré qu’on pouvait encore succomber à un album de pur Heavy Metal, à une époque où Speed Metal, Thrash Metal, Crossover semblaient avoir quelque peu ringardisé le genre originel. Avec son Heavy Metal carré, puissant et percutant, le quartette québécois remettait en quelque sorte l’église au milieu du village. Deux ans plus tard, Sweet Dreams confirmait le talent du groupe en matière de Heavy Metal, tout en témoignant d’une progression impliquant plus de mélodies, plus de nuances. En dépit de compositions réellement prenantes, le succès public ne fut visiblement pas assez conséquent, car le groupe se sépara en plein processus de préparation d’un troisième album.

Troisième album qui nous parvient… trente-quatre ans plus tard !!! Certes, le groupe originel s’est reformé en 2011 pour se produire sur scène, mais il n’avait produit aucune nouvelle musique depuis. Passée la joie initiale de retrouver cette formation, ô combien attachante, viennent les appréhensions légitimes : et si le groupe avait perdu son savoir-faire dans la composition et l’interprétation, et s’il se fourvoyait dans une approche passéiste, et s’il tentait de singer le son et les manières du Metal moderne ? Bref, et si SWORD décevait…

Avec ce troisième opus studio, SWORD conserve avant tout une qualité essentielle qui caractérisait Metalized et Sweet Dreams, à savoir cette capacité à, d’une part évoluer dans les codes classiques du Heavy Metal, voire du Hard Rock, d’autre part une capacité à s’approprier ces codes pour les restituer de manière personnelle. Outre un art diablement efficace de la composition, les membres du groupe ont conservé intacts leurs qualités d’interprètes, ce qui relèvent de l’exploit sur une telle période.


Premier élément fortement distinctif de l’empreinte de SWORD, le chant de Rick HUGUES a conservé tous les particularismes qui en faisaient dans les années 80 un chanteur particulier. Il se montre tout à fait à l’aise dans des lignes de chant très articulées, puissamment expulsées, mais magistralement modulées entre registre médium et incursions franchement perçantes, la clarté du timbre étant génialement voilée dans les pics d’intensité. Voilà ce qu’on aisément caractériser comme une voix caractéristique, avec une authentique signature vocale.

Tout aussi important, le champ d’intervention de la guitare, assuré par le chef de bande Mike PLANT. Aujourd’hui encore, le maître à penser du combo se montre aussi habile que par le passé à combiner les riffs teigneux et rugueux avec des solos incisifs, jamais démonstratifs mais toujours mélodiquement construits. Chaque incursion en solo électrise et illumine le morceau en cours.

Mépriser l’importance du tandem rythmique serait proprement méprisant, tant le jeu dynamique et adaptatif du batteur Dan HUGHES (le frère du chanteur) s’avère diablement efficace et dynamique, tant dans les séquences mid-tempo que dans les accélérations franchement nerveuses, comme sur l’impérieux (I Am) In Kommand, Bad Blood (après une intro rampante), et sur la séquence médiane de Took My Chances. Avec à la clé, un usage millimétré d’une caisse claire explosive, d’une grosse caisse impactante et un usage assez riche des cymbales, du charleston et des toms. Le rôle du bassiste Mike LAROCK consiste à consolider, de manière simple, quoiqu’épaisse et passablement tellurique, des fondations déjà nettement dessinées.

Bien que marqué par les années 80 et opéré par des vétérans, ce troisième opus de SWORD affiche une vivacité revigorante et témoigne que l’on peut avoir été et toujours être, plein de sève et d’ardeur, d’autant mieux administrées qu’elles le sont par des experts sans prétention, mais assurément pas sans talent. A mon sens, une seule question se pose : êtes-vous un amateur farouche du Heavy Metal de tradition ? Si oui, alors l’acquisition de cet album se fera à votre plein et entier bénéfice !

Certes, SWORD n’aura jamais été en position de révolutionner ni le Heavy Metal, ni le Hard Rock, pas plus en 1986, en 1988 ou qu'en 2022. A l’écart des tendances à l’œuvre, quoique sans jamais nier les exigences modernes, SWORD délivre cependant un album cohérent, finement conçu, puissamment délivré et mis en son. L’essence du Metal 80’s, revisité en ce siècle en somme.

Vidéos de (I Am) In Kommand cliquez ici et de Dirty Pig cliquez ici
Alain
Date de publication : samedi 26 novembre 2022