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26/11/2022
Hivemind
ASHBREATHER
 
Il est souvent un peu facile de prétendre qu’un groupe vous fait plonger dans son univers, cependant la formule n’est pas galvaudée en parlant d’ASHBREATHER qui développe littéralement un monde musical à part. Déclenchons une rafale d’étiquettes tout en ayant conscience qu’aucune ne collera parfaitement au trio : death, sludge, prog, psyché et comme diraient les tontons flingueurs :
- « Y’aurait pas des fois du alt-metal ? »
- « Si. Y’en a aussi ».

Pour tenter d’expliquer ce à quoi peut ressembler ASHBREATHER, imaginez une chimère construite à partir de MASTODON, DEVIN TOWNSEND, VOÏVOD et VEKTOR… pour les plus pointus d’entre vous, ajoutez une bonne dose de CITY WEEZLE et de YURT et vous obtiendrez une esquisse qui pourrait s’en rapprocher… ou pas, car ASHBREATHER ne sonne que comme ASHBREATHER : une incomparable fusion de brutalité et d’extrême subtilité au sein de laquelle chaos et limpidité s’entremêlent.

Outre son univers musical très personnel, les québécois se singularisent par cet album conceptuel composé d’un unique titre de 37 minutes – ambitieux projet ! Ils nous y racontent la découverte dans un coin de l’espace d’une race d’insectes dont la cacophonie des esprits reliés entre eux modèle un idéal individuel en constante réécriture. Je vois facilement le rapport entre la parabole de « l’esprit de la ruche » et notre humanité hyperconnectée via les réseaux sociaux. Pas vous ?

Certes, ce titre unique est divisé en onze mouvements mais aucun n’est un morceau vraiment autonome. Ce découpage virtuel ne serait-il pas une preuve par l’exemple de l’histoire qui nous est contée ? Comme si chaque partie était un insecte qui pensait par lui-même et participait avec sa personnalité propre à l’âme de l’œuvre. Et si je pousse le raisonnement d’un cran, je constate que chacun de ces onze insectes a été composé et interprété par trois musiciens en parfaite symbiose, chacun se mettant au service d'une musique commune dont la qualité globale transcende la somme des talents individuels… ASHBREATHER serait la ruche et la ruche serait ASHBREATHER… c’est dingue !

Que du muscle ! Il n’y a pas de ventre mou dans Hivemind. Cela ne signifie pas que l’album déboule à fond de train du début à la fin, bien au contraire, les temps calmes et un peu psychédéliques côtoient du speed furieux ou chaotique. Les points d’orgue se succèdent régulièrement, tous plus jouissifs les uns que les autres. Par exemple, le quatrième mouvement est totalement addictif, que ce soit dans sa phase très rapide ou après le basculement plus heavy et épique. Je craque également pour le huitième mouvement qui alterne une mystérieuse atmosphère doom et des passages infernaux – que du bonheur ! ASHBREATHER nous prouve son exceptionnelle maîtrise de tous les terrains, aussi à l’aise à plein régime que dans la rêverie atmosphérique.

Il est assez déconcertant d’être confronté à une telle maturité d’écriture et d’exécution de la part d’un groupe à la discographie aussi réduite. En effet, il n’a à son actif qu’un premier album éponyme (Ashbreather - 2020), et un EP (Ow, My Eye – 2021). Sur le premier album, le groupe avait la forme d’un quatuor avec chanteur, aujourd’hui devenu trio, les membres chantent tous les trois sans qu’il y ait de leader. Les voix se succèdent, se complètent ou s’accordent selon les besoins de la cause. Charles et Colin s’occupent du growl et de quelques voix harmoniques claires, tandis que Mackay fait la plupart des voix claires et thrashy.

Avec Hivemind le challenge était ardu mais a été relevé haut la main. Bravo ! Cet album est un réel accomplissement. Il est symptomatique d’un groupe au potentiel énorme que je m’attendrais plus à trouver dans le catalogue d’un prestigieux label qu’en autoproduction. À présent, c’est à vous tous d’en profiter. S’il vous plaît, faites-le avec respect : lecture aléatoire proscrite !

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ASHBREATHER est composé de :
- Mackay AGELLON, guitares, chant, percussions, saxophone ;
- Charles RICHARDS, basse, chant, percussions, drones ;
- Colin MACANDREW, batterie, chant, percussions.

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Pumpkin-T
Date de publication : samedi 26 novembre 2022