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04/08/2023
Nothing compares to metal
VELVET VIPER
 
Débutons cette chronique par un hommage sincère en la foi immarcescible de la chanteuse Jutta WEINHOLD. Il s’agit d’une chanteuse allemande qui a, me semble-t-il, débuté à la fin des années 60, notamment dans le domaine des adaptations de comédies musicales, incluant des participations dans trois des plus fameuses de cette époque, à savoir Hair, Godspell et Jesus Christ Superstar (autant d’œuvres fascinantes, écoles d’exigence en matière technicité et d’expressivité vocales, Julien CLERC ne fit-il pas ses débuts dans la version française de Hair ?). Au début des années 70, outre une collaboration avec le mythique groupe de Krautrock AMON DÜÜL II, elle évolue dans un registre Blues Pop Rock, avec à la clé plusieurs singles à partir de 1973, ainsi que deux albums sous son nom, Coming, (1976), suivi par un album sans titre en 1978. Après quoi, elle se produit notamment sur scène aux côtés du chanteur allemand Udo LINDENBERG (on l’entend sur l’album live Livehaftig, datant de 1979). Le début des années 80 s’avère plus aride, avec un album du Jutta WEINHOLD BAND (Mach 'nen Bogen um die Drogen, 1980) suivi de Volksmusik (1982, avec polémique incluse du fait du titre), dans le cadre de BRESLAU.

A partir de 1985, celle qui est d’ores et déjà une artiste confirmée, effectue un virage absolument essentiel pour sa carrière : elle forme le groupe ZED YAGO et se lance dans le Power Metal à tendance épique. Publié en 1988 sur le label indépendant en pleine croissance Steamhammer, From Over Yonder impose au public européen une rencontre entre le Power Metal à l’allemande (musculeux, carré, ultra-efficace) et des tendances plus épiques. En 1989, propulsé par la major (sur le déclin) RCA, Pilgrimage confirme la solidité des ambitions du groupe, sans pour autant que la notoriété du combo ne dépasse les frontières germaniques.

Pour de sombres raisons que nous sommes bien incapables d’élucider, ZED YAGO est dissous en 1990, au profit de VELVET VIPER, groupe formé à la main de la chanteuse. Dès 1991 paraît un premier album sans titre (toujours sur RCA), suivi en 1992 de The 4th Quest For Fantasy (publié dans un contexte nettement plus confidentiel). A ce stade, aussi bien ZED YAGO que VELVET VIPER semblent des noms voués à l’oubli, Jutta livrant plusieurs albums sous son nom propre.

Jusqu’à la résurrection de VELVER VIPER en 2017, avec de nouveaux musiciens autour de Jutta. Toujours fidèle au Power Metal épique, le groupe nouvelle formule livre Respice Finem (2018, GMR), The Pale Man Is Holding A Broken Heart (2019, Massacre), From Over Yonder (2020, Massacre, soit une réinterprétation intégrale du premier album éponyme de ZED YAGO), Pilgrimage (2020 également, toujours chez Massacre), Cosmic Healer (2021, Massacre).

Le copieux Nothing Compares To Metal envoie moins que jamais le moindre signal de renoncement au Power Metal épique. L’album est gavé jusqu’à la gueule : onze compositions pour une durée totale d’une heure, rien en dessous de cinq minutes, deux titres au-dessus de sept minutes, voilà qui consolident les défenses et affiche même de féroces prédispositions à l’attaque ! De fait, quand il s’agit de se montrer quelque peu rapide et surtout nerveux, le groupe déploie un Heavy Metal, certes fort classique (piochant dans toutes les références du début des années 80, de JUDAS PRIEST, ACCEPT à BLACK SABBATH, version DIO), mais musclé par une rythmique imparable et par une approche massive et impérieuse. Comprenez que le résultat s’avère invariablement tranchant, lourd, mais aussi farouchement mélodique (rôle essentiel de la guitare solo). Le souci tout germanique d’efficacité n’exclue fort heureusement pas quelques atours plus subtils ; on les souhaiterait plus nombreux, mais VELVET VIPER se doit à son public principal et national, adepte de ce type de Metal, à la fois fidèle à la tradition du début des années 80, quoiqu’avide avant tout de schéma plus véloces et, surtout, plus musculeux (dès la fin de la décennie 80).

Hormis les prestations instrumentales à 75% dédiées à l’efficacité, reste à jauger la qualité de la prestation vocale d’une Jutta qui, sans offense aucune, affiche 75 ans au compteur. Diantre, que la prestation de la chanteuse s’avère incroyablement assurée, investie, passionnée, et surtout fiable et ultra-efficace : mes hommages, madame ! Même si son registre demeure globalement clair, il faut souligner que son timbre se pare à volonté d’un voile rauque, oscillant entre l’ostentatoire et la subtilité qui convient pour choyer le cœur des Metalheads avides de sensations expressives, puissamment exprimées. A un niveau équivalent de technicité et d’émotivité, je ne vois que la symbolique DORO et la scandaleusement sous-estimée LEATHER.

Au moment de découvrir ZED YAGO en 1988, j’étais un fan de Heavy Metal épique en quête du prochain BLACK SABBATH version DIO, d’un CANDLEMASS plus accessible, d’un ACCEPT développant son versant Princess Of The Dawn. Autant le dire tout net, je ne fus pas convaincu, ni par ZED YAGO, ni par VELVET VIPER première formule. Aujourd’hui, je demeure insatisfait, VELVET VIPER demeurant une formation avant tout préoccupée par un souci d’efficacité. Il n’empêche qu’il plane sur l’ensemble de l’album une manière de supplément d’âme, avec cette combinaison savamment dosée de mélodies évidentes, de chœurs impérieux, de refrains accrocheurs et de rythmiques musculeuses. Chapeau bas, Jutta !

Vidéos de Nothing Compares To Metal cliquez ici et de Invisible Danger cliquez ici
Alain
Date de publication : vendredi 4 août 2023