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10/08/2023
Sleep walkers
SOME PILLS FOR AYALA
 
À la base, je suis assez puriste dans mon approche du rock et je me sens attaché à l’aspect collectif de la démarche, depuis la création musicale jusqu’à la performance scénique. La notion de « groupe » est rassurante et conforme à la tradition. Toutefois, il y a tout un tas de raisons valables qui poussent des artistes, pour la plupart multi-instrumentistes, à créer des œuvres en solo : le besoin de s’exprimer dans d’autres formes que celles de leur groupe, les raisons médicales qui leur interdisent la scène, l’isolement géographique… Aidés par une technologie démocratisée, les « one-man-bands » se multiplient et je me résous à l’idée d’aimer un album sans pouvoir applaudir le groupe en concert. Quand l’album plait, pourquoi bouder son plaisir ? Je vous en conseillerai plusieurs en fin d’article mais pour l’heure, saluons l’œuvre de Néstor AYALA CORTÉS sous le nom de SOME PILLS FOR AYALA, et spécifiquement son nouvel album Sleep Walkers.

Connu depuis 2011 pour sa participation aux guitares et au chant d’AT DEVIL DIRT, Néstor a commencé son projet solo SOME PILLS FOR AYALA en 2021 avec comme objectif apparent de s’enfoncer vers un stoner plus profondément psychédélique. En réalité, comme d’autres créateurs durant la pandémie, il a été soumis à une forte pression interne (un effet cocotte-minute) qui l’a poussé à trouver une solution pour continuer à s’exprimer. Depuis, il est inarrêtable. Après les deux EP Some Pills For Ayala (2021) et The Crows That Sing (2022), Sleep Walkers est le premier album long du projet.

Le titre d’ouverture, A Flower In My Left Eye, caractérise bien l’album avec ce chant indolent superposé à un seul et même riff passant par plusieurs couleurs pendant les quatre minutes que dure le groove chaloupé qui enfume la tête, pire qu’un album complet de SWEET SMOKE. Voilà un fort sympathique premier contact avec la musique de SOME PILLS FOR AYALA qui mélange le flower power avec du stoner bien gras. Et tous les titres s’écoulent ainsi, chacun avec sa petite personnalité. Je pense à Blood Or Love aux fragrances sabbathiennes, à Into Oblivion à l’ADN hippie et dont la guitare oscille entre un son psychédélique et du space rock. La quatrième plage Let Me Free possède une grosse intro punchy et, dès que les voix retentissent je tombe en arrêt devant la prestation de Néstor. Le chant est un vrai point fort de l’album. Il donne lieu à de subtiles harmonies qui me font parfois penser aux expériences les plus psyché des BEATLES. Je goûte ensuite à la pièce la plus doom, Reflections sur un riff lent et grave. Quel groove ! Le morceau Sleep Walkers me tire vers la trance grâce à sa rythmique en boucle, ses bourdons et son synthé orientalisant. Heureusement, Smile And Die m’arrache à la torpeur et apporte une nouvelle façon de chanter avec une voix plus acide. Encore un très bon arrangement vocal sur Sore. Dommage que le titre très rythmique s’achève aussi brusquement. Il y a trois ou quatre titres qui finissent ainsi, coupés net, et peut-être qu’une piste d’amélioration pour Néstor serait de travailler un peu plus ses outros. L’album est clôturé par un morceau proche de neuf minutes, The Way I See The World, un final très agréable.

Notons que le mixage et le mastering de l’album ont été confiés à David VELIZ au Planetario Fuzz Recs (Horcón, Chili). Quant à l’illustration de couverture elle est signée Mirkow GASTOW. Ceci étant, je reste toujours admiratif devant les compétences du gars capable de composer, écrire, jouer, chanter, produire presque tout seul une œuvre de la qualité de Sleep Walkers. Au-delà du tour de force que cela peut représenter, l’album en question est chargé d’émotion est sera une vraie friandise pour les amateurs de fuzz !


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Extraits de Sleep Walkers :
- A Flower In My Left Eye : Cliquez ici !
- Let Me Free : Cliquez ici !

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3 bons one-man-bands de Heavy rock :

- THE MATTERHORN PROJECT de Zahari TZIGULAROF : J’adore l’album The Traveler, sa poésie très sombre dans un genre qui mêle Post-rock, Sludge, Doom et Progressif. Lire ici.

- TITANOSAUR de Geoff SAAVEDRA : Je garde toujours une oreille attentive tournée vers le Stoner metal surpuissant que produit Geoff dont j’ai chroniqué avec plaisir les deux derniers albums, Absence Of Universe et No One Home. Lire ici. et Lire là.

- MUD SPENCER de Rodolphe BELLUGUE : Comment ne pas citer ici le somptueux travail de Rodolphe, ce français isolé sur une île indonésienne, qui mêle sur Kliwon le Doom metal et la culture asiatique ? Lire ici.
Pumpkin-T
Date de publication : jeudi 10 août 2023