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06/11/2023
The chosen few
20 WATT TOMBSTONE
 
J’adore ce genre de groupe qui, à partir d’un patrimoine avéré, développent au long terme un répertoire qui relève autant de la vénération que de l’appropriation cultivée. 20 WATT TOMBSTONE est un tandem originaire du Wisconsin (autant dire les Etats-Unis profonds), composé de Tom JORDAN (guitare et chant) et de Mitch OSTROWSKI (batterie et chant). De longue date, les deux compères vouent un culte au Blues Rock séminal, qu’ils se font fort de faire fructifier dans une version, rugueuse, épaisse et fort chargée en électricité.

Formule on ne peut plus avérée sur ce succulent album. Fort bref (est-ce un EP ?), The Chosen Few n’en délivre pas moins la quintessence du propos du duo : du Blues Rock, amplifié par une électrification sauvage. D’aucunes pourront d’entrée de jeu objecter que la formule n’est pas nouvelle. En effet, la formule développée par 20 WATT TOMBSTONE depuis la première décennie de ce siècle consiste à capter des héritages multiples. Si l’on remonte au plus lointain, il faut se référer au Blues dépouillé, développé dans la moiteur du delta du Mississippi, puis électrifié dans la zone des Grands Lacs : songez pêle-mêle à Robert JOHNSON, Son HOUSE, Big Joe WILLIAMS, Bukka WHITE, LIGHTNIN' HOPKINS, Jimmie RODGERS, puis à John Lee HOOKER, BB KING, le tranchant Albert KING, Freddie KING, l'indispensable et versatile Buddy GUY...
Soit un son rêche, une expression brute et dépouillée. L’étape suivante consiste à plonger de plain-pied dans la fusion entre le Blues et le Rock dans la seconde moitié des années 60 (les Britanniques YARDBIRDS, ROLLING STONES, THE ANIMALS, suivis par les Américains CANNED HEAT, Johnny WINTER…), laquelle aboutit au magma fusionnel des années 70.

Ainsi, 20 WATT TOMBSTONE développe dans la seconde décennie du 21ème siècle un Blues Rock sauvage et épais, certes de prime abord primitif, mais de facto très maîtrisé. Il est ici question de riffs de guitare épais et gluants comme de l’asphalte en fusion, de parties fulgurantes de guitare slide qui électrisent cette épaisseur rythmique ; en complément, on profite de vocaux directs et rauques, chaleureux mais vigoureux (partagés entre les deux membres). Les nostalgiques de la décennie 1965-1975 ne manqueront pas d’invoquer les mânes de CACTUS, ZZ TOP, JAMES GANG, HOT TUNA, ALLMAN BROTHERS BAND et tant d’autres.

Le fait est que ce duo creuse le même sillon avec opiniâtreté, son souci d’épaissir et de densifier les parties rythmiques induisant de facto une connexion avec le vaste courant, plus récent, du Stoner Rock. Histoire de revendiquer des pistes multiples, cet opus comporte deux reprises, l’une de Midnight Train To Memphis, originellement signée par l’interprète Country Chris STAPLETON (2017), l’autre de Just Got Paid, commise par ZZ TOP en 1972 (sur son second album, Rio Grande Mud). Les racines, encore et toujours les racines, mais toujours revisitées via un prisme électrique. Dans une même logique, les fans de SEASICK STEVE, de THE WHITE STRIPES, de THE BLACK KEYS, peuvent légitimement se plonger dans ce bref opus, quitte à risquer un électrochoc.

Vidéo de Prophet Man : cliquez ici
Alain
Date de publication : lundi 6 novembre 2023