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Chronique
DRUDKH - All belong to the night / всі належать ночі

Style : Melodic Extrem Metal
Support :  MP3 - Année : 2022
Provenance du disque : Reçu du label
4titre(s) - 45minute(s)

Site(s) Internet : 
DRUDKH FACEBOOK
DRUDKH BANDCAMP

Label(s) :
Season Of Mist
 (18/20)

Auteur : Alain
Date de publication : 03/12/2022
Tourments de la nuit
Il y a des groupes plus difficiles à manier que d’autres. Ainsi en va-t-il de DRUDKH, formation dont les membres ont fréquenté les rangs de formations essentielles de la scène Black Metal ukrainienne (HATE FOREST, ASTROFAES, BLOOD OF KINGU, PRECAMBRIAN). Quand j’évoque une difficulté, je ne fais pas référence à des polémiques lancées par le passé quant à l’orientation politique du groupe, celui-ci étant avant tout inspiré et dédié à la culture ukrainienne. Encore sur cet album, DRUDKH s’inspire des œuvres de deux poètes ukrainiens, Yakiv SAVCHENKO (1890-1937) et Antin PAVLUK (1899-1937), tous deux exécutés lors des purges initiées par Staline. Assumé depuis vingt ans déjà, le nationalisme ukrainien de DRUDKH résonne bien autrement aujourd’hui que l’on peut comprendre que la volonté systématique – russe tsariste, soviétique, puis à nouveau russe - de minimiser les particularités de la culture ukrainienne visait à nier toute identité spécifique, gênante pour les visées dominatrices d’un encombrant et fort agressif voisin. En somme, pourquoi ne serait-il pas respectable de vouloir redonner une visibilité artistique à des artistes ukrainiens, à partir du moment où cela ne se traduit pas par un discours excluant, xénophobe et dominateur ?

Non, la difficulté réside précisément dans la longévité du projet et dans une discographie qui compte dorénavant pas moins de douze albums. Avec une question essentielle (comment surprendre encore ?) et des embûches nombreuses (comment évoluer ? comment ne pas se trahir ? comment conserver les fans initiaux ? comment attirer de nouveaux adeptes ?). Je ne prétends absolument pas être un fan de la première heure et je déteste les postures élitistes qui visent à fétichiser les premiers pas d’un groupe, pour mieux se distinguer et exclure les convertis ultérieurs. Pour autant, rien n’empêche de conserver intactes les sensations vivaces ressenties en 2005 en découvrant Swan Road, le troisième album. Je m’étais détourné du Black Metal après avoir pleinement vécu l’explosion des années 90. Mais, par la suite, à quelques exceptions près, je m’étais lassé, entre d’un côté les intégristes True et Raw, d’un autre les tenants d’un BM symphonique en carton-pâte ou d’un BM indus rapidement caricatural. Avec DRUDKH, je retrouvais un son – à la fois âpre et impactant -, une vision – culturelle, épique, voire romantique -, une ambition farouche.

Après avoir oublié – par négligence, pas par choix objectif – de suivre la discographie de DRUDKH depuis au moins une décennie, découvrir All Belong To The Night représente objectivement un challenge. Avant même d’avoir entendu une note, on peut constater que DRUDKH n’a en rien abdiqué son goût immodéré pour les durées conséquentes. Le combo a opté pour une option encore plus radicale que par le passé : quatre compositions seulement, avec des durées étagées entre un minimum de 8’25 pour November / Листопад et un maximum très conséquent de 15’31 pour Till We Become The Haze / Поки зникнем у млі, les scores intermédiaires atteignant 10’22 pour The Nocturnal One / Нічний et 11’31 pour Windmills / Млини. A ce stade, deux craintes se profilent, avec un même résultat à la clé : s’emmerder dans les grandes largeurs ! Soit du fait d’une monotonie répétitive dont le Black Metal se délecte parfois ad nauseam, soit du fait de prétentions progressives par trop ostentatoires. Brisons le suspense : non seulement DRUDKH version 2022 évite habilement ces deux écueils, mais ils les convoquent pour mieux les combiner ! Dans le cadre fort confortable des durées évoquées ci-avant, le groupe a tout loisir d’installer des séquences basées sur des motifs réitérés obstinément, à en devenir hypnotiques (riffs en trémolos acides, batterie trépidante et sèche) ; mais il peut tout autant agencer des séquences multiples et imbriquées, se différenciant les unes par rapport aux autres par leur tempo, leur rythme, leur ambiance. En somme, DRUDKH combine de manière équilibrée et naturelle les pulsions abrasives et obsédantes du Black Metal avec l’agilité et la versatilité propres au Prog en général.

Dans ce contexte, The Nocturnal One peut bien ouvrir l’album en mode ultra-classique : riffs en trémolo, tempo rapide, vocaux rauques et aigres, menaçants et vénéneux. Du grand classique. Et pourtant, on dénote des riffs plus tranchants, des lignes de basse nerveuses et fort mobiles parfaitement audibles. Au bout de quatre minutes, surgit un gros break, plus épuisé, dépouillé et efflanqué que réellement atmosphérique. La ré-intensification se fait progressivement, avant que l’ensemble retrouve brièvement un rythme de croisière belliqueux, qui se fracasse sur un break attentiste, laissant la place à un mid-tempo BM hanté par des vocaux maladifs et des mélodies sous-jacentes. Une fort belle entré en matière.

Voix claires et lancinantes, sous-tendues par du sound design flippant : Windmills bénéficie d’une introduction presque ritualiste, la guitare électrique s’immisçant d’abord en mode cristallin, puis de manière plus abrupte, accompagnant un chant explosif d’agressivité. L’alternance entre tempérance mélodique et agressivité retenue se maintient, avec une forte tension dramatique, jusqu’à une intensification brouillonne, débutant à 6’30, cascadant jusqu’à la fin. Efficace.

November s’ouvre sur une guitare acerbe mais claire, avec une batterie en animation subtilement reptilienne, avant qu’un tempo accéléré n’embarque pour une longue séquence de guitares acides et de vocaux hallucinés. Un apaisement se produit à 4’30, avant une reprise de l’agression vocale avant la sixième minute, quand bien même la rythmique demeure en mid-tempo, avec cependant des variations multiples. Ici, se manifeste la maturité…

Tout fier de dominer par sa taille l’ensemble de l’album, le morceau Till We Become The Haze / Поки зникнем у млі incarne à la perfection la maturité atteinte par DRUDKH. Parfaitement en maîtrise pour ce qui relève de l’interprétation et de la mise en son, le groupe alterne agressivité purement efficace et nuances multiples, mises sous tension maximale et apaisements rustiques, les trois dernières minutes s’imposant comme un modèle de conclusion progressive, visant à un dépouillement progressif. C’est sur ce dernier titre que DRUDKH me convainc définitivement, tant je perçois au fond de mes tripes la pertinence d’un groupe qui parvient, à force de sincérité viscérale et de maîtrise technique, à incarner profondément un projet artistique, visant à rendre compte d’un pays, d’une culture et d’une Histoire, menacées et sommées de disparaître au profit d’un pesant, brutal et négateur voisin septentrional.

Hormis toute considération géopolitique, All Belong To The Night / Всі належать ночі ancre plus que jamais DRUDKH à l’orée d’une frontière artistique ambitieuse et tumultueuse, pas encore précisément délimitée, mais porteuse d’ambitions fougueuses et perpétuant un affect foncièrement tourmenté et agressif. Un tel apport permet tout autant de se connecter à l’actualité que de constater que, même dans les zones les plus martyrisées du globe, des activistes parviennent à alimenter le hideux Moloch Baal du Metal.

Concernant nos inquiétudes initiales, DRUDKH réintroduit de la curiosité, voire de l’enthousiasme, sans toutefois redéfinir ses propres règles, a fortiori sans dépasser les fondamentaux du genre. Néanmoins, maintenir un équilibre aussi riche et ambitieux, quoique fortement lesté de classicisme Black Metal, suffit à coter positivement All Belong To The Night / Всі належать ночі. Слава Україні = Slava Oukraïni !!!

Vidéo de November : cliquez ici
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Pumpkin-T Le samedi 3 décembre 2022

Ville : MARSEILLE
Intéressant, ouaip.
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